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Famoudou Konaté

 
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François Kokelaere
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Inscrit le: 24 May 2002
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MessagePosté le: 18 Dec 2002 19:33    Sujet du message: Famoudou Konaté Répondre en citant

Famoudou Konaté

Famoudou est né en 1940 près du village de Sangbarala, dans la région de Kouroussa, en Haute-Guinée. Son parcours est très proche de celui de Mamady Keïta. Il fut recruté à l'âge de 19 ans dans les Ballets Africains, l'autre grand ballet national de la République de Guinée avec lequel il parcourut le monde pendant vingt-six ans. En 87, trois ans après la fin du régime marxiste, il est invité en Allemagne par un connaisseur, Johannes Beer, afin de donner des stages et des concerts.

Famoudou est considéré par ses pairs comme l'un des plus grands batteurs de l'éthnie malinké. Il est l'un des rares à connaître de nombreuses polyrythmies traditionnelles, phrasés et soli qui les accompagnent. Famoudou a su rester en contact permanent avec le terroir et, malgré ses fréquents séjours en Europe, il demeure encore aujourd'hui en Guinée. Réputé excellent pédagogue, ses stages sont très recherchés. Doué d'un son extraordinairement contrasté et d'un jeu d'une efficacité qui n'a d'égale que sa sobriété, Famoudou fait «chanter» son tambour comme s'il s'agissait d'un instrument mélodique.

Famoudou a enregistré:

* "Rhythmen der Malinké" pour Museum Collection Berlin réf n°18, très difficile à trouver du fait de sa non-distribution

* pour la collection «Musique du Monde» du label Buda Musique:
- Malinké rythmes et chants réf: 927272
- Hamana Foli Kan réf: 822302

* Par ailleurs, on le retrouve sur les deux disques de Mamady Keïta chez Fonti Musicali, «Mögöbalu» réf: fmd 205 et «Hamanah» réf: fmd 211

Famoudou Konaté : comment je suis devenu tambour

En 1962 – à l'âge de 22 ans – je suis arrivé à l'ensemble des Ballets Africains. Avec lui, j'ai fait six fois le tour du monde et me suis produit dans de très nombreux pays. Le Ballet était une création de l'époque révolutionnaire, quand la Guinée se libérait de la colonisation française. Ma famille est originaire de Kankan, la seconde ville de mon pays. Mon grand-père avait – comme beaucoup d'autres – fui la ville à cause du régime de terreur d'Alemamy Samoury, qui avait tué de nombreuses personnes, et était allé à Kouroussa. Puis mon père a vécu près du fleuve Margo. Il avait de nombreux ouvriers. Avec leur aide et celle de ses enfants, il a cultivé du riz – du riz Foursa, la meilleure espèce qui soit, et qui est devenue très rare de nos jours.

Famoudou Konaté et Mouloukou Kanté ~ 1962

A l'époque, il n'y avait pas encore d'engrais chimique, et quand le sol était épuisé, on s'installait ailleurs pour planter, en attendant qu'il se ressource. Ainsi, je suis né dans un village du nom de Manina, à environ 100 km de Kankan. Aujourd'hui, ce village n'existe plus. Plus tard, mon père est retourné dans son ancien village.

Pourquoi je suis devenu tambour ? Normalement, il n'y a que dans les familles de forgerons ou de griots que l'on devienne tambour. Mon père ne descendait ni de forgerons, ni de griots – pourtant, il avait toujours aimé fabriquer des tambours pour sa famille, des djembés, des dununba, des sangban et des kenkeni. Alors ses enfants ont tous joué du tambour très tôt. Mon père m'aimait énormément, et quand je n'avais que quelques années, il m'a construit un tout petit djembé, dont la peau était tendue (contrairement à l'usage d'aujourd'hui) avec de petites tiges de bambou. J'étais l'un de ses 45 enfants – mon père avait sept femmes ! Il était très fortuné. Il y avait 15 à 20 maisons dans le village, mais quand il y avait une grande fête, les gens du village se réunissaient toujours dans la maison de mon père. Il possédait de nombreuses vaches et de nombreuses chèvres, et il avait assez de riz. Alors, les jours de fête, on abattait chez lui et on mangeait beaucoup.

Pour leurs réunions, les femmes du village avaient construit leur propre maison, la "Boulou" – une belle maison avec un grand foyer, à travers lequel on arrivait dans la cour. Quand la maison était terminée, son inauguration devait être fêtée avec du tambour. A l'époque, mon frère jouait très bien du djembé – il était déjà grand. Moi, avec mes huit ans, je ne pouvais pas encore porter le grand djembé, il était plus lourd que moi. Les femmes sont allées vers mon père et lui ont dit : nous voulons que ton fils Famoudou joue pour l'inauguration de la maison boulou. Mon père a répondu aux femmes : mais il est encore trop petit pour jouer du grand djembé ! Mais les femmes ont rétorqué : on va se débrouiller ! A l'époque, quand on voulait qu'un tambour joue pour une fête, il fallait donner dix noix de cola. Aujourd'hui, c'est toujours comme ça. Donc, les femmes ont donné dix noix de cola à mon père et je suis allé à leur fête. Elles bavardaient, dansaient et chantaient et moi, je les accompagnais sur le tambour. Bien sûr, c'étaient encore des rythmes assez simples. C'est comme ça que la fête s'est déroulée. Puis les femmes sont venues remercier mon père.

Quand j'ai eu 18 ans, le mouvement de libération contre la France coloniale a commencé. Il y avait deux groupes – les uns voulaient que la Guinée continue à appartenir à la France, les autres luttaient pour l'indépendance. Et les deux parties voulaient que je joue pour eux. J'étais déchiré. L'un de mes frères n'était pas pour la révolution, mais pour ceux qui étaient pour l'appartenance à la France. Un autre frère, qui jouait bien du djembé, était pour l'indépendance – alors je jouais pour l'indépendance. Mais les autres était plus puissants, ils avaient beaucoup plus d'argent, et parfois, ils ont tenté de me séduire avec ! Ils arrivaient la nuit et disaient : ne joue pas pour les autres ! Joue pour nous ! Nous te donnerons de l'argent !

En 1958 enfin, il y a eu l'indépendance. A l'époque, il y avait un Guinéen en France Keita Foudiya, qui avait formé une troupe à partir de musiciens de différents pays d'Afrique – le Bénin, la Côte d'Ivoire, le Togo et la Guinée. Cette troupe s'appelait les Ballets Africains. Puis le nouveau président de Guinée, Sékou Touré, a nommé Foudiya ministre de la défense. De retour en Guinée, il a alors fondé une nouvelle troupe et l'a nommée Ballets Africains de la République de Guinée.

Quand le Ballet est revenu en Guinée après sa première tournée européenne, j'ai été recruté dedans, on peut même dire incorporé, comme dans l'armée ! Ils organisaient des fêtes dans toutes les régions, tous les musiciens possibles jouaient devant les membres du Ballet, et ceux-ci notaient les noms de ceux qui étaient bons. Je trouvais l'idée d'aller en Europe extraordinaire – moi qui n'avais encore jamais été ne serait-ce qu'à Conakry !

Tous les tambours et tous les danseurs de la région étaient là, et tous, tout comme les membres du ballet, portaient une cravate. Nous avons allumé le feu pour les tambours et les avons tendus de plus en plus haut et de plus en plus fort. Tous les tambours ont joué leurs rythmes en même temps, il y en avait au moins douze. Le bruit était si fort que l'on ne distinguait plus rien. Alors ils ont dit : chacun son solo, l'un après l'autre ! Tout le monde a joué. Puis ils ont appelé : Famoudou de Sangbarala ! J'ai joué, j'ai joué et peu à peu, tous ceux du Ballet se sont levés. Un grand danseur, Laiba Soko, s'est mis à danser comme un fou. Pendant que je jouais, il s'est levé d'un bond et a fait un énorme salto arrière. Avec cravate ! Il était très satisfait de mon jeu et a noté mon nom. C'est ainsi que l'on m'a convoqué. Ceci dit, quand les gens de mon village ont commencé à me répéter sans cesse : tu veux aller au Ballet ? N'est-ce pas dangereux de voyager aussi loin ? En Europe ? – j'ai eu un peu peur. Mais je n'avais pas d'autre choix que d'y aller, c'était une sorte d'incorporation. Alors en décembre 1962, je suis allée à Conakry. Je devais jouer du dununba, du sangban, du kenkeni et du djembé, et danser aussi – j'ai tout fait, y compris danser ! Et, comme je l'ai déjà dit, j'ai visité la plupart des pays du monde au cours de nombreuses grandes tournées. Je suis resté au Ballet jusqu'en 1987. Puis on m'a invité en Allemagne, afin de m'y produire en solo et de donner des cours. Une fois cette expérience vécue, je ne suis plus retourné au Ballet.

Au cours des 26 ans au Ballet, j'ai oublié beaucoup de rythmes traditionnels. On y joue certes en style traditionnel, mais d'une manière qui est altérée par l'aspect concert. Au fond, je n'aimais pas ça. Mais je n'avais pas le pouvoir de le changer, car ce n'était pas moi le maître. Une fois que j'ai quitté le Ballet, j'ai commencé à me remémorer les rythmes traditionnels ou à les réapprendre, ainsi que de nombreuses vieilles chansons, auprès des gens de mon village natal de Sangbarala. Les Malinké ont une culture très riche. Une vie ne suffirait pas pour apprendre tous les rythmes qui existent – il y en a trop. Une fois, j'ai noté les noms de tous les rythmes que je connais et j'en ai compté plus de 80. Mais en plus, il y a encore les rythmes des Sousou, des Foula et des autres peuples de mon pays.

A chaque fois que je vais au village, j'entends des rythmes que je ne connaissais pas encore. Ces rythmes si nombreux sont encore tous joués aujourd'hui. Mais peu à peu, il y a des problèmes qui apparaissent : même chez nous, il y a des discothèques à présent, et en plus, la télévision gagne du terrain. Quand les habitants du village s'installent à Conakry, ils perdent leur ancienne culture. Mes enfants par exemple, qui habitent en ville : ils ne connaîtraient plus grand chose à notre ancienne culture si je ne leur enseignais pas, si je ne les emmenais pas régulièrement au village avec moi, et si je n'organisais pas des ateliers dans ma maison. Mais un jour, quand il n'y aura plus de gens comme moi, notre culture traditionnelle – y compris notre musique – risque d'être perdue. Une fois, quelqu'un m'a demandé si j'appréciais que des Européens venaient me voir pour apprendre ma musique. Je lui ai répondu : c'est très bien pour nous ! Cela nous aide beaucoup – cela nous aide à faire connaître notre musique et à la maintenir en vie.

Rythmes et chants de guinée © 2003 Lugert Verlag
[le livre est en cours de réalisation]

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