Fran�ois Kokelaere


Inscrit le: 24 May 2002 Messages: 273 Localisation: France
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Post� le: 12 Dec 2002 19:17 Sujet du message: Noumody Ke�ta |
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Fran�ois Kokelaere pour Batteur Magazine en Septembre 95
Adieu Noumody!
Noumody Ke�ta, chef-tambour de l'Ensemble National des Percussions de Guin�e nous a quitt�s le jeudi 22 Juin 95, des suites d'une courte maladie, � l'�ge de 47 ans.
Avec le d�part de Noumody, c'est un des tout meilleurs " djemb� fola " qui s'en va mais c'est aussi l'annonce de la fin d'une �poque. Il appartenait � cette g�n�ration de musiciens recrut�s tr�s jeunes par les structures de l'ancien r�gime marxiste de Guin�e et form�s � la dure �cole des ballets nationaux. D�s l'�ge de 18 ans, il entre dans les Ballets Africains, le grand ballet national guin�en, avec lequel il parcourra le monde pendant plus de vingt ans.
En 1987, il est retenu parmi les sept percussionnistes qui formeront le prestigieux ensemble des Percussions de Guin�e. Dans les ann�es 90, on lui reconna�t quatre alter-ego en la pr�sence de Famoudou Konat�, Fadouba Olar�, Mamady " Kargus Ke�ta " et Gbanworo Ke�ta. Cinq " djemb� fola ", tous guin�ens, qui firent l'unanimit� � travers le monde; une g�n�ration dont chacun des membres, �tait dou� d'une personnalit� musicale bien marqu�e: un style, un jeu particulier bien distinct; des musiciens qui poss�daient un art incomparable de se promener sur la polyrythmie sans jamais donner l'impression de charger le rythme; une propret� du son et une aisance sans pareille; une intelligence de l'art de faire " respirer " la musique.
Un charisme exceptionnel
En ces temps o� le djemb� se vulgarise � travers le monde, Noumody �tait le d�positaire incontest� d'une certaine fa�on de jouer. Dou� d'un charisme exceptionnel, quelques notes lui suffisait � capter son auditoire m�dus�. Un solo de Noumody vous " scotchait " � votre fauteuil et le connaisseur avait soudain le souffle court, des frissons dans le dos, tellement l'impression �tait forte. En tant que chef-tambour, il prenait le solo en derni�re position; il laissait ses coll�gues montrer leur savoir faire et attendait patiemment que vienne son tour et l�, tel un pr�dateur, en quelques notes, avec un �norme sourire entendu, il imposait sa supr�matie technique et musicale. En quelques phrases �videntes, la tension montait d'un cran, tout en progression jusqu'au paroxysme de sa v�locit� qui faisait se lever les salles du monde entier. Puis, d'un blocage parfait, il retrouvait la polyrythmie et reprenait l'accompagnement. Dou� d'un talent hors du commun, il savait �tre aussi un tr�s grand professionnel, intraitable avec les retardataires; il �tait chef-tambour et entendait qu'on le sache et qu'on le respecte comme tel.
Une r�f�rence en la mati�re
Pivot des Percussions de Guin�e, craint et respect� de tous, dou� d'une personnalit� d�cid�e, il �tait l'embl�me d'un ensemble de musiciens dont les �nergies �taient v�ritablement accord�es et qui �tait une r�f�rence en la mati�re.
Une certaine forme de coh�rence qui laissait peu de place aux concessions incontournables qu'exigent la sc�ne et le march� international. Il avait su rest� lui-m�me: un homme simple qui savait ce qu'il voulait et surtout, ce qu'il ne voulait pas. Professeur recherch�, il savait aussi enseigner et quand un de ses �l�ves admiratif lui disait qu'il �tait l'un des meilleurs au monde, il r�pondait modeste, qu'il connaissait " un peu " le djemb� mais qu'il lui restait fort � faire pour le ma�triser! Il n'h�sitait pas � d�mystifier son art qu'il consid�rait avant tout, comme l'accumulation d'une exp�rience et d'une �norme pratique personnelle.
Une g�n�ration qui passe
A l'heure, o� trois des plus grands " djemb� fola " ont d�pass� la cinquantaine, o� les plus jeunes tardent � s'affirmer, trop t�t sollicit�s pour faire carri�re � l'�tranger sans avoir pu disposer de la longue formation des anciens, o� les meilleurs subissent les �normes pressions r�ductrices du grand show-business international qui demande toujours plus de spectacle au d�triment de la qualit� musicale, o� les Percussions de Guin�e, compl�tement destabilis�s par l'absence de Noumody n'arrivent plus � retrouver leurs marques et leur raison d'�tre, tous les signes sont l� de la fin d'une �poque. Bien sur, il reste quelques bons batteurs en Afrique de l'Ouest mais combien disposent du bagage musical, culturel et psychologique pour affronter les dures lois du m�tier de musicien international? Combien disposent du charisme et de la personnalit� d'un Noumody, d'un Famoudou, d'un Kargus, d'un Gbanworo, d'un Fadouba?
L'avenir du djemb�
L'instrument est en pleine mutation et les rythmes, les polyrythmies, de part leur rayonnement extraordinaire au niveau international, ont une tendance manifeste � s'appauvrir mais, de nouvelles pulsations, de nouvelles fa�ons de jouer, issues de la rencontre entre l'Afrique et l'Occident, apparaissent. On peut esp�rer que les pays africains concern�s, prennent enfin en consid�ration un art si repr�sentatif et intrins�quement li� � la culture sp�cifique de l'Afrique de l'Ouest.
Souhaitons que des pays comme la Guin�e continuent et accentuent leurs efforts autour des percussions en termes de pr�servation du patrimoine, d'encouragement et d'encadrement des jeunes afin de dynamiser un secteur encore bien vivant.
Souhaitons que les jeunes percussionnistes africains prennent un peu plus le temps d'�tudier aupr�s de leurs anciens avant de s'envoler trop vite vers l'apparente facilit� d'une carri�re internationale souvent perturb�e par l'absence d'un r�el encadrement professionnel.
Noumody Ke�ta est n� en 1948 � Kouroussa, Guin�e et d�c�d� le jeudi 22 Juin 95 � Conakry.
Discographie
" Ensemble National des Percussions de Guin�e "
Buda Musique-Paris - Collection " Musique du Monde "
Volume I - R�f: 82501 et Volume II - R�f: 92586[/b] |
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Mais qui est Fran�ois Kokelaere ? |
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